Michel Garroté -- Le conflit entre l'Arabie saoudite sunnite (qui soutient les salafistes) et le Qatar, lui aussi sunnite (qui soutient les Frères Musulmans), prend une nouvelle tournure. Le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu s'est rendu en visite dans l'émirat qatari, après que le président dictateur islamiste sunnite turc Recep Tayyip Erdogan ait critiqué l'isolement dont était victime Doha.
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Plusieurs autres pays clefs de la région ont également refusé de soutenir la coalition anti-qatarie. Dans ce contexte l'Arabie saoudite et l'Égypte, qui donnent le ton dans la campagne contre Doha, ont dû relâcher la pression sur l'émirat. Après qu'une crise diplomatique très profonde ait éclaté dans le Golfe, plaçant les alliés d'autrefois des deux côtés des barricades, le Qatar, isolé, a bénéficié d'un soutien explicite de deux acteurs clefs de la région: la Turquie et l'Irak.
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Le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu s'est rendu en visite à Doha pour rencontrer son homologue qatari Tamim Ben Jassem al-Thani. Après cet entretien, il s'est envolé vers l'Arabie saoudite. Rappelons que Riyad a été l'un des principaux initiateurs de la démarche diplomatique à laquelle plus de dix pays arabes ont déjà adhéré à différents degrés. Certains États ont rompu leurs relations diplomatiques avec le Qatar, d'autres ont annoncé une diminution du niveau des relations diplomatiques. Ces démarches faisaient suite à la publication, sur le site de l'agence de presse qatarie, d'un communiqué au nom de l'émir al-Thani sur la nécessité d'un rapprochement avec l'Iran chiite - le principal adversaire géopolitique des monarchies sunnites du Golfe.
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Avant la visite de Mevlüt Cavusoglu à Doha, le président Erdogan s'est posé en principal défenseur du Qatar. Devant les membres du Parti islamique (AKP) au pouvoir, il a mis en garde les initiateurs du blocus contre les risques d'une telle politique « lourde de conséquences ». « L'isolement du Qatar est une erreur fatale contraire aux valeurs islamiques », a déclaré Erdogan. « Le Qatar a adopté une position intransigeante contre l'organisation terroriste État Islamique sévissant en Turquie. Les persécutions contre le Qatar par une campagne lancée contre lui ne mèneront à rien de bon », a-t-il ajouté. Selon le chef de l'État turc, dans cette situation le « roi d'Arabie saoudite, en tant que leader des pays du Golfe, doit régler la crise ».
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Ainsi, les relations extrêmement tendues entre la Turquie et l'Iran chiite, qui conserve pratiquement des relations d'allié avec le Qatar sunnite, n'ont pas empêché Ankara de rejoindre le même camp que Téhéran. Sachant que Erdogan n'a pas seulement pris la défense de l'émirat isolé en paroles mais aussi en actes. Il a signé une loi sur le déploiement au Qatar d'un contingent turc pour le maintien de la stabilité dans la région. Ankara a tout intérêt à régler la situation car la crise autour du Qatar pourrait se retourner contre la Turquie, notamment en créant de nouveaux foyers de déstabilisation et en réduisant son influence au Moyen-Orient.
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La déclaration de Erdogan, qui a tenté de reprendre l'initiative à la coalition internationale formée contre le Qatar, a coïncidé avec celle du Premier ministre irakien Haider al-Abadi. Ce dernier estime que les sanctions contre l'émirat ne frappent pas les autorités mais le peuple. Initialement Bagdad avait affiché une position neutre dans le conflit autour du Qatar, afin de rester à l'écart. Mais finalement les autorités du pays ont décidé d'adopter la même position que la Turquie. Le Koweït, Oman, le Maroc et la Jordanie refusent également de se positionner contre l'émirat. le Qatar a des leviers de pression sur les pays où il existe de puissantes organisations représentant le mouvement islamiste des Frères musulmans.
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En Jordanie les membres de ce mouvement sont représentés au Parlement, et en Turquie les racines de l'AKP remontent aux Frères musulmans. Le groupe de soutien au Qatar ne se limite pas aux pays du Moyen-Orient. En Asie du Sud, le Premier ministre sunnite pakistanais Nawaz Sharif (dont le pays détient l'arme nucléaire) a été l'un des premiers à annoncer sa réticence à rompre les relations diplomatiques de son pays avec le Qatar. Le Qatar bénéficie également d'un soutien en Europe. Les importateurs européens d'hydrocarbures qataris ne souhaitent pas que la situation se détériore dans la région et ils appellent déjà à régler le conflit au plus vite.
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L'évolution de la situation internationale autour du Qatar laisse entrevoir que les initiateurs du blocus font déjà marche-arrière, prenant conscience du fait qu'ils ne parviendront pas à isoler complètement l'émirat. Le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel al-Joubeir a déclaré lors d'une conférence de presse conjointe avec le secrétaire d'État américain Rex Tillerson que techniquement, il ne s'agit pas d'un blocus en déclarant : "Nous avons autorisé une circulation libre d'un pays à l'autre et nous sommes prêts à fournir au Qatar de la nourriture et des médicaments si nécessaire".
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Le Caire, autre initiateur du blocus, a également changé sa ligne. Le ministre égyptien sunnite de l'Aviation civile, Cherif Fathy, a annoncé que son pays levait les restrictions contre les compagnies aériennes qataries sur l'utilisation de son espace aérien. De son côté, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a déclaré que la crise diplomatique autour du Qatar ne devait pas dégénérer en guerre et que la stabilité devait être rétablie dans la région.
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Michel Garroté pour Les Observateurs
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https://fr.sputniknews.com/presse/201706151031844748-qatar-isolement-coalition-monde-islamique/
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