Bavure : la France en cause dans la mort de 11 otages d’un groupe djihadiste au Mali

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Onze militaires maliens capturés entre juillet 2016 et mars 2017 par l'organisation djihadiste «Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans» (JNIM), dirigée par le chef touareg malien Lyad Ag Ghaly. L'espoir d'une libération s’est brisé après une opération anti-terroriste menée fin octobre par l’armée française sous l'égide de l'opération Barkhane.

La frappe en question visait un camp à Abeïbara, nid de djihadistes situé dans la région de Kidal, dans le nord-est du pays. «Nous avons assez d’éléments pour le dire : début octobre, nous avons reçu des preuves de vie de nos militaires capturés par les terroristes. Dans la nuit du 23 au 24 octobre, après un raid anti-terroriste, nos militaires ont été tués. Nous avons échangé avec les Français sur le sujet», a déclaré un responsable du ministère malien de la Défense le 5 novembre à l’AFP. Ce sont des photographies des corps envoyées aux autorités maliennes par le groupe terroriste qui ont permis aux autorités de faire cette amère constatation.

Un document émis par le ministère de la Défense et des Anciens combattants malien, qui corrobore la responsabilité des forces françaises, a aussi été publié. Il souligne que «des militaires maliens détenus par des terroristes ont trouvé la mort» et que «les reconnaissances menées durant la phase de préparation n'ont pas permis de déceler la présence de militaires maliens».

Un groupe djihadiste dénonce la bavure française

Ce dénouement fâcheux intervient après un imbroglio en forme de bavure commise par l’armée française, restée jusqu’ici quasi silencieuse.

Le 27 octobre, quelques jours après le raid, le JNIM avait publié un communiqué stipulant que les prétendus djihadistes tués lors du raid français n’étaient pas des leurs mais bien les 11 militaires maliens qu'ils détenaient en captivité. «L’armée française croisée injuste a procédé à 3h du matin [dans la nuit du 23 au 24 octobre] avec un avion de type Mirage à un raid aérien entraînant la mort des 11 prisonniers de l’armée malienne qui se trouvaient sur place sous la surveillance d’un groupe de moudjahidines», selon ce communiqué, publié en français et en arabe.

Le même jour, un point presse avait permis à l'état-major de dévoiler le succès prétendu de l'opération et de juger que les assertions du JNIM sur la mort des 11 soldats étaient de la «propagande», dans des propos rapportés par AP.

Un tweet a aussi relayé l’opération et confirmé la mort d’un «groupe armé terroriste» ainsi que la saisie d’un vaste arsenal.

En réponse, le JNIM, accusé de manipulation pour mettre en cause les forces armées françaises, a répliqué en proposant de fournir des photos et vidéos des corps des soldats morts pendant l’assaut, «proposant de les faire autopsier par une instance indépendante». «En réponse aux mensonges français, nous sommes prêts à fournir les corps afin de prouver leur identité», conclut-il.

Mais malgré cette annonce et les rumeurs grandissantes qui évoquaient la responsabilité de la France dans la mort des 11 otages, aucune information supplémentaire ne filtrait. Le colonel Patrick Steiger, porte-parole de l’état-major des armées, a répondu au journal Le Monde qui a relayé ses propos le 3 novembre, s’arc-boutant sur son succès militaire, celui d'avoir annihilé un camp djihadiste dangereux à l'aide d'avions Mirage 2000 et d'hélicoptères Tigre. «On ne commente jamais la propagande de l’ennemi. La guerre se fait aussi sur le terrain de l’information. Nous sommes sûrs d’avoir détruit ce campement qui dépendait d’Aqmi. A présent, c’est aux autorités maliennes, avec qui nous sommes en étroite collaboration bien sûr, de déterminer l’identité des personnes exécutées ou arrêtées», avait-il déclaré. Des dénégations aujourd'hui embarrassantes pour l'armée.

Un bien triste épilogue à cette histoire, alors que le 18 octobre, le groupe islamiste avait fait parvenir une vidéo dans laquelle les 11 soldats imploraient le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, de faire le nécessaire pour obtenir leur libération. 

 

Des groupes armés qui défient toujours les forces maliennes et françaises

Alors que l’opération Barkhane a été lancée au Sahel le 1er août 2014, l’armée française, qui a réussi à repousser les djihadistes dans le nord du pays, est toujours la cible d'escarmouches, attentats et offensives des groupes islamistes. 4 000 hommes sont actuellement déployés pour sécuriser le pays. Face à eux, l’organisation des groupes djihadistes sur le terrain se fait plus efficace. En effet, depuis le 2 mars 2017, les groupes djihadistes présents en Afrique de l’Ouest tels Ansar Eddine, Al Mourabitoune, la katiba Macina et Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) se sont unifiés sous le commandement du chef Iyad Ag Ghali. Cette figure historique du mouvement touareg malien est devenu en 2012 le chef djihadiste du groupe Ansar Eddine, celui dont l’armée française avait cherché à détruire une position le 23 octobre. Ce regroupement fait allégeance à Al-Qaïda et a pris pour nom «Groupe de soutien à de soutien à l’islam et aux musulmans»

Lire aussi : Vers une force antidjihadiste au Sahel, sous l'impulsion de la France

 

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